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pour Beslan

L'intrusion du photographique vient aussi répondre à cette attente mais la nature intimiste de la scène bouleverse notre rapport aux pleurs eux-mêmes, et à leurs part de réalité. Les textes parallèles au travail de P.Convert ne me satisfont pas. Je me lancerais donc dans l'interprétation assez hasardeuse. Mais il me semble de manière simpliste les images/sculptures ne font qu'enraciner l'image dans une sacralité qui se rapproche du fétichisme. Sans donc en révéler les différentes couchent qui constituent ces icônes de presses, P.Convert les envoie directement vers un dépouillement incarné par des jeux d'empreintes.
Pourquoi "pour retrouver l'empreinte exacte de leur origine historique et esthétique" ne laisse-t-il pas la photographie parler d'elle-même et montrer qu'il n'y a justement pas d'empreinte originelle, mais une superposition complexe de niveau de regard?
L'imitation ne peux pas rejoindre le silence du sacré par la voie royale de l'origine.
A l'inverse de P.Convert, je pense que l'archéologie d'une image se fait par le déguisement et non pas par le creusement. Il est évident que l'idée de baroque m'est venu inconsciemment par rapport à ces images. Mais plus que toutes autres références picturales, le baroque invoque avec lui, la théâtralité, la mise en scène pour un regard devant lequel s'offre un sublime.
Cet invisible est évidement présent dans la composition et résulte bien de la décontextualisation de ces images.

VOIR SANS MERCI



AFP dit que le recours à l'émotion esthétique est un moyen de nous raprocher d'une souffrance lointaine. Les photographies de presse évoquant la peinture sacrée - mise au tombeau, pieta...- sont des photographies dans laquelle la haute expressivité de l'émotion amène de la comapassion et "fait prendre conscience de l'ampleur du drame".
De telles affirmations nécessitent tout de même une grande prudence.
La prudence amène au geste.
Pascal Convert explicite sa démarche:"La ressemblance iconographique étrange de ces instantanés avec des scènes de déploration du Christ nous place non pas face au réemploi où la citation si souvent présent dans l'art contemporain ou la publicité, mais face à l'imitation, au sens médiéval du terme. Posture chrétienne fondamentale, l'imitation du Christ visait à retrouver la ressemblance première à Dieu".
Madonne, Pieta, ces expressions issues du lexique chrétien ne doivent pourtant pas nous faire oublier que ces scènes se produisent en fait dans un réel et son contexte particulier, il s'agit là d'une lecture certes spontantée mais ethnocentriste de l'image.
Il y aurait quelque chose de l'ordre de la mise en scène alors.
Pascal Convert parle de ces images non pas comme citation à la peinture sacrée mais bien comme imitation de la peinture sacrée. Sans chercher le fondement d'une ressamblance à Dieu, on peut bien se demander qu'elle est cette motivation à insuffler du sacré dans une image de presse, une photographie d'histoire. Dominique Baqué continue: "...Mais comme le souligne avec pertinence Pascal Convert, cette crise (des images), assorties de ce qu'il nomme la "mutabilité esthétique" d'images polymorphes, d'images "en mercure liquide", participe peut-être plus gravement encore d'une crise du référent."
Dans les deux cas, Madonne et Pieta, un regardeur occidental ne peut manquer d'identifier la figure de la femme éplorée à celle de la Vierge, tandis que la scène construite sur le modèle du tableau religieux, en appelle doublement et de facon quelque peu perverse, à la fascination esthétique et à la compassion éthique.
Cette question de la perversité va venir se placer au centre du débat.
Pour résumer, D.Baqué taxe ces images d'un basculement de l'humanisme vers l'humanitaire, d'une imagerie de conscience politique vers une image "qui ne parvient plus à se doter d'un sens politique mais renvoie à une sorte de fatum contre lequel rien n'est possible, sinon subir, déplorer et compatir."
Ce résumé est certes insuffisant mais il est nécessaire de souligner comment la valeur même de l'image est donc discutable.

Notre regard sur les pleurs est déjà conditionné pour n'exister que sous la forme d'une représentation, pour nous protéger à la fois de nous-même et pour pouvoir se protéger de la douleur de l'autre. Le clichet des gens qui pleurent ne base pas son pouvoir sur l'inhabituel et le nouveau de la situation, mais biensurs sur les acquis de la fiction des pleurs eux-même dans nos sociétés et leurs représentations dans l'histoire. Sans passer par le sacré, l'image des pleurs est une image générique de l'être dans la violence des émotions. C'est une image interpassive car pour notre "protection", les pleureuses pleurent à notre place.
C'est une image scénique, c'est à dire visible sur scène uniquement pour ne pas subir cette violence. Cette scène peut être alors soit de fondement sacré, iconographie religieuse ou d'origine théatrale, fictionnelle dans un mythe, une allegorie.

raw introduction

Nous sommes ensemble un peu partout, à New York, Sharm Al Sheik, Jérusalem, Beslan ou même Madrid. Vous et moi.
Les gens pleurent autour de nous, ils arrivent aussi d’un peu partout,mais certains nous disent ne venir de nulles part.
Ils nous disent que leurs fonctions a toujours été de pleurer, mais ils ont oublié depuis longtemps pourquoi, ils pleurent (c’est tout), se cachent les yeux de tout le monde.
Et ils ont vu l’objet de leurs pertes disparaître à son tour.

Alors il ne reste plus que le vide, un manque à pleurer.
Vous ne voyez pas bien où je veux en venir.
Mais je me suis mis dans la tête d’aider ces gens. Leurs conditions de travail sont très précaires et je pense pouvoir leur proposer une meilleure entreprise, afin qu’ils retrouvent chacun une dignité perdue dans la répétition machinale de trente-cinq heures de pleur par semaine.
Cette entreprise qui s’est depuis longtemps consacrée aux larmes , c’est la SARL Baroque. En effet, elle sait proposer aux gens les meilleures dorures sur cadres, attirails décoratifs les plus spectaculaires pour élever leurs larmes dans les hauteurs sacrées de l’invisibble. Plus de figures grimacantes, les pixels grossiers deviendraient une chair passionnée, plus de bras ou de jambe tronquée par un photographe en hate de faire ses clichets. Plus de vide, non plus, ce vide stupide dans lequel chacun de ces gens ont perdus leurs origines, leurs raisons de pleurer. Le vide devient baroque, centre irreprésentable (de toute façon), traversant toutes surfaces vers un lieu où chacun peut enfin se mettre d’accord sur ce qu’il ne voit pas.
J’ai trouvé ces gens dans les magazines, au 20 heures et beaucoup sur internet. Je ne pouvais pas leurs demander de démissionner, alors je les ai reproduit (c’est en effet une propriété de ces gens que de pouvoir ce reproduire à l’identique, à l’infini. Mr Warholl, un prétendu chercheur, nous l’a bien montré).
Seulement les moyens de reproductions photographiques ne me semblaient pas appropriés. Ils ont la facheuse tendance de prendre trop de pouvoir ( pas leur principes d’authenticité, la qualification propre aux gens qui pleurent).
Il se trouve que les gens qui pleurent sont de parfaits modèle pour dessiner. Alors j’ai choisi le crayon, le papier et ma main pour reproduire chaque gens que je trouvais.
Ainsi, sans démissionner, ils devenaient par le dessin ( reproduction à moindre frais) à ma disposition pour une semaine d’essais dans ma nouvelle entreprise.